mardi 25 septembre 2012

La couleur des sentiments


4ème de couv' : Jackson, Mississippi, 1962. Dans quelques mois, Martin Luther King marchera sur Washington pour défendre les droits civiques. Mais dans le Sud, toutes les familles blanches ont encore une bonne noire, qui a le droit de s'occuper des enfants mais pas d'utiliser les toilettes de la maison. Quand deux domestiques, aidées par une journaliste, décident de raconter leur vie au service des Blancs dans un livre, elles ne se doutent pas que la petite histoire s'apprête à rejoindre la grande, et que leur vie ne sera plus jamais la même. Passionnant de bout en bout, "La Couleur des sentiments" a bouleversé l'Amérique et déjà conquis plus de deux millions de lecteurs, parmi lesquels un certain Steven Spielberg.

Mon avis : Je suis littéralement tombée sous le charme de ce récit frais, poignant, touchant, écrit dans une langue agréable et soignée. Les personnages sont justes et attachants, que ce soient les trois figures principales d'Aibileen, de Minny ou de Skeeter, ou les personnages négatifs, même si ces derniers sont parfois un peu caricaturaux (mais c'est de bonne guerre, quand on pense au traitement des noirs dans la littérature du genre). On ne les en déteste que plus, même si je trouve que l'auteur a bien réussi à montrer que chacun n'est que le produit d'une mentalité de l'époque et d'une éducation. C'est donc parfois un peu manichéen, mais cela n'empêche pas le récit d'être vraiment passionnant. J'ai particulièrement aimé le personnage d'Aibileen et son rapport aux enfants qui donne bien à voir le déchirement de ces femmes qui élèvent des enfants blancs avec amour, dévotion pour les voir adopter malgré cela un comportement odieux et colonialiste vis à vis d'elles en grandissant... Le livre débute comme une confession intimiste et gagne peu à peu en épaisseur et en tension : le récit à 3 voix permet d'envisager les rapports des uns aux autres de façon différente, de voir des "bonnes" et des patronnes différentes, de ne pas sombrer dans l'angélisme ni diaboliser un personnage en particulier, mais de replacer le problème dans le cadre d'une société toute entière, confite dans ses préjugés, installée dans un système arriéré qui ne laisse pas de place aux gens de couleur, certes, mais qui ne laisse pas de place aux femmes tout court, qui voit le monde changer, mais n'intègre que peu ces transformations... Bref, c'est aussi un vrai roman sur les années 60, leurs contradictions, et le vent de changement qui souffle sur toute une époque.
Un énorme coup de coeur, donc !

lundi 24 septembre 2012

Vipère au poing

4ème de couv' : Ce roman, le plus célèbre de l'auteur, est aussi largement autobiographique. Comme dans l'ensemble de son oeuvre, Hervé Bazin y donne les raisons de sa haine et de son combat contre toutes les oppressions familiales et sociales. Vipère au poing raconte la lutte impitoyable livrée par Brasse-Bouillon, alias Jean Rezeau, ainsi que ses frères, contre leur mère, une marâtre odieuse, calculatrice et violente. Folcoche, ainsi que ses enfants la nomment, règne avec autorité sur une famille angevine bien-pensante, ne lésinant pas sur les coups de fouet, les brimades et les humiliations. Mais Brasse-Bouillon est malin, vif et clairvoyant. Il affronte sa mère en lui tendant à son tour les pièges qui l'aideront à avoir raison d'elle. Au premier degré, le livre possède un incontestable humour qui marque les esprits (inoubliable Folcoche, parangon de méchanceté !). Mais, il est avant tout un cri d'enfant et la dénonciation d'un certain modèle d'éducation qui fit longtemps les beaux jours des familles françaises.

Mon Avis : Un avis rapide, car c'est une relecture, plus de 20 ans après la première... J'avais vraiment aimé lire ce livre, trouvant Folcoche atroce, et Brasse-Bouillon admirable dans son combat contre sa mère. J'ai aujourd'hui certainement mieux apprécié la finesse de l'écriture de Bazin, les traits d'humour du texte que je n'avais pas perçu adolescente, mais j'ai aussi pu mesurer combien Jean était le produit de cette éducation et de cette époque, me le rendant parfois désagréable, ou juste agaçant... En tous cas, j'ai aimé pour la deuxième fois cette histoire, avec peut-être moins d'intensité (car avec moins de révolte ?) réalisant davantage que l'éducation reçue par le personnage principal, quoique exagérément stricte et odieuse n'était peut-être pas tant une exception que cela...

mardi 18 septembre 2012

La Part de l'autre


4ème de couv' : Mais que se serait-il passé, qu'aurait-il donc pu advenir, si au contraire Hitler avait été reçu aux Beaux-Arts comme apprenti peintre méritant ? À partir de cette question, de cette infime infinie possibilité, bascule l'Histoire dans son entier. S'ouvrent le doute, l'espoir, l'incertitude. L'imaginaire surtout, en la matière de cet étonnant roman où, fidèle à ses habitudes, l'auteur parvient – sur une idée plutôt convenue – à filer une trame aussi haletante que vertigineuse. Alternées tour à tour, défilent en effet sous nos yeux deux vies que tout oppose, en fonction de causes initiales radicalement opposées. D'un côté le clochard, le caporal à la Croix de fer, le dirigeant du parti national-socialiste fan de l'opéra wagnérien Rienzi, le dictateur misanthrope dément dont le romancier développe une biographie dûment renseignée. De l'autre, Adolf H., jeune homme soigné par Freud pour ses troubles sexuels (une belle rencontre, sur laquelle plane en clin d'œil le fantôme de la célèbre pièce de Schmitt : Le Visiteur !), peintre de l'école surréaliste du légendaire Montparnasse parisien, ardent défenseur du sionisme…

Mon avis : La lecture n'a pas été simple... même si j'ai aimé au final. Pour commencer, je m'attendais, habituée à Schmitt, à un format court... Et comme je lis sur liseuse, je ne me rends pas compte de l'épaisseur des livres en début de lecture. J'ai déjà été surprise par la longueur du roman. Ensuite, même si le principe est séduisant, j'ai trouvé le résultat parfois un peu poussif et décevant. En fait, ces deux hommes que tout oppose au final ne m'ont jamais semblé au départ être une seule et même personne... Ils sont trop différents : trop noir/blanc... L'un organise l'extermination des juifs, l'autre est sensible à la cause sioniste. L'un ne supporte pas les femmes, l'autre vit des relations profondes et indéfectibles. L'un adore la guerre, l'autre la hait... Trop manichéen et simpliste à mon goût. Je crois que j'aurais davantage accroché à quelque chose de plus nuancé... L'écriture aussi m'a parue moins élégante qu'à son habitude. A vrai dire, j'ai lu les deux histoires avec plaisir, mais sans enthousiasme, et je les aurais lues tout aussi bien séparées que mises en parallèle. Je crois d'ailleurs que j'ai préféré la partie sur Hitler : cette plongée dans l'âme du dictateur, ses obsessions, ses travers m'a parue vraiment intéressante. J'ai fini sans peine, et lu avec régularité, mais je ne me suis pas sentie embarquée par le roman...